N°H20 – Tous professionnels de santé

HANDICAP PSYCHIQUE :
ACCOMPAGNER AUX SOINS SOMATIQUES

Dernière mise à jour :

LE HANDICAP PSYCHIQUE, c’est la limitation de la participation d’une personne à la vie sociale du fait de troubles psychiques qui perdurent et entraînent une gêne dans son quotidien, des souffrances et/ou des troubles comportementaux. Ces troubles sont variables, évolutifs et sensibles au contexte

 

> Peut entraîner une altération des capacités cognitives (concentration, compréhension, mémoire, cognition sociale…), mais n’affecte pas les facultés intellectuelles.

LE HANDICAP PSYCHIQUE 

On retrouve fréquemment : 

Situation d’isolement et de repli social, de précarité

Tendance à l’auto-stigmatisation : auto-dévalorisation, mauvaise estime de soi et honte ; crainte du jugement d’autrui

Troubles du rythme nycthéméral fréquents

Difficultés d’initiation et manque d’énergie pour agir

Manque de motivation et d’intérêt

Difficulté à percevoir et évaluer ses besoins pour sa santé physique, et donc un moindre recours au système de soins, et aux aides extérieures

• Troubles cognitifs souvent associés :
troubles de l’attention et de la concentration entrainant des difficultés de mémorisation,
difficultés de planification et d’organisation pour exécuter une tâche,
manque de persévérance et fatigabilité cognitive.

Ces facteurs de vulnérabilité sont des tendances, non des constantes.

Ils sont variables en intensité, fréquence, durée, d’une personne à l’autre.

QUEL IMPACT SUR LE PARCOURS DE SOINS ?

Les personnes en situation de handicap psychique ont tendance à abandonner les démarches de soins, par découragement face aux efforts répétés pour agir, du fait de difficultés à rechercher des informations ou à faire face à une action nouvelle ou vécue comme compliquée ; sans avoir la perception du besoin d’une aide extérieure. Les impacts sont multiples, fluctuants, c’est pourquoi il est essentiel de promouvoir un accès équitable et adapté aux soins.

Les difficultés à se mobiliser de façon persistante pour se soigner et à exprimer ses difficultés majorent le risque de rupture du parcours de soin

• Difficulté dans la gestion administrative : Assurance Maladie, mutuelle ; Dossiers MDPH…

• Risque de rupture du parcours de soins :

– Examens biologiques, radiologiques, RDV de consultations : non programmés, non honorés ; résultats non transmis. 

– Difficultés de compréhension ou absence de suivi des consignes médicales ou paramédicales pour les soins ou les examens, pouvant amener à la non prise en charge d’une pathologie diagnostiquée.

– Échappement aux dispositifs de Santé Publique : dépistages des cancers, vaccinations, suivi gynécologique régulier.

• Risque d’arrêt des traitements : plus spécifique, il concerne aussi bien les traitements psychiatriques que somatiques, et il est lié:

– à l’état somatique,

– à l’état psychique (l’angoisse et l’insomnie désorganisent les prises),

– à une mauvaise observance comme dans toute pathologie chronique,

– des effets secondaires, souvent non rapportés spontanément ; à rechercher systématiquement.

QUELLES SONT LES DIFFICULTÉS DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ ?
LE REPÉRAGE DU HANDICAP PSYCHIQUE N’EST PAS ÉVIDENT
Le handicap psychique est un handicap invisible. Il est parfois peu décelable même pour des professionnels de santé.
Le manque d’autonomie n’est pas visible et surtout peu dicible.

La personne ne parle pas de ses troubles psychiatriques (crainte de la stigmatisation, vécu de honte, banalisation ou minimisation de ses difficultés devant autrui).

LE RAPPORT DE LA PERSONNE À LA SANTÉ ET AUX SOINS EST DOMINÉ PAR LA PEUR

• Difficultés à se confier sur les peurs liées à sa santé, aux examens ou aux soins.

Craintes ou indifférence inadaptées.
LE DIAGNOSTIC DES PATHOLOGIES SOMATIQUES EST COMPLEXE

Tendance à se focaliser sur la pathologie psychiatrique :

 – le symptôme est associé à tort aux traitements psychotropes ou à la pathologie psychiatrique,

– la plainte est d’ordre délirant (hypochondries majeures, mélancolies).

Repérage parfois peu évident d’un problème de santé car la personne peut présenter :

– un déni des symptômes ou une indifférence,

– des difficultés à exprimer sa plainte avec parfois une présentation déroutante,

– une expression atypique de la douleur, avec nécessité d’utiliser des échelles d’évaluation de la douleur qui soient adaptées.

NE PAS PENSER TOUT SOMATIQUE OU TOUT PSYCHIATRIQUE !

Tenir compte du ressenti et des propos de l’entourage, des soins somatiques comme avec toute personne…

COMMENT ACCOMPAGNER AUX SOINS SOMATIQUES ?
LA RELATION : UNE ALLIÉE INDISPENSABLE
Instaurer un climat de confiance et de bienveillance

• Première consultation :

Accorder une attention particulière à la relation car l’évaluation clinique peut s’avérer complexe :

– L’entretien est parfois peu évident car les symptômes peuvent être difficiles à exprimer.

– Une alliance efficace est souvent longue à établir, plusieurs entretiens sont généralement nécessaires.

– Le tiers / aidant / personne de confiance est un allié important.

• Tout au long du parcours de soins :

– Encourager la personne à ne pas dépendre de la psychiatrie pour tout le parcours de soin, et à se tourner vers un médecin traitant de ville pour les soins courants,

– Penser à la resolliciter pour la poursuite des soins (au besoin rappel des RDV, possibles RDV téléphoniques),

– Quand l’aidant est présent, ne pas l’écarter de la consultation (après avoir sollicité l’accord du patient), et s’adresser directement au patient. 

L’INFORMATION, LES EXPLICATIONS SUR LES SOINS ET LES TRAITEMENTS : ADAPTÉES À LA PERSONNE

Donner des explications claires, réalistes et rassurantes sur : 

– la maladie et les soins nécessaires, leur intérêt

– les modalités de réalisation des examens pour le diagnostic et le dépistage

• Décrire le parcours de soins

L’éducation thérapeutique du patient (ETP) peut aider à renforcer la connaissance et la maîtrise des enjeux liés à sa santé physique, et à comprendre les missions du médecin généraliste, complémentaires de celles de la psychiatrie dans le parcours de soins.

• Recueillir son consentement même si le contact apparait étrange ou distant.

Bien expliquer chaque traitement (médicaments, pansements, kinésithérapie, mise en place des attelles, etc.) pour éviter la rupture thérapeutique favorisée par le manque d’informations : 

– effets et bénéfices attendus, et sous quel délai,

– intérêt du respect de l’horaire et de la régularité de prise du traitement,

– explication des principaux effets secondaires, notamment sédation et insomnie,

– risques de surpoids et syndrome métabolique,

– risques en cas de non-observance ou d’arrêt précoce du traitement.

Proposer, inciter à se faire accompagner pour ses examens, ses soins paramédicaux ou médicaux, y compris lors d’hospitalisation, toutes situations stressantes pour la personne.

LA COORDINATION DES SOINS : DES TEMPS INDISPENSABLES
Nécessité fréquente de soins en équipe pluriprofessionnelle
• Communiquer entre professionnels de santé pour un meilleur accueil, un meilleur parcours de soin et une prise en charge de la personne efficace et adaptée.

• Partager les informations : médicales mais aussi sociales

– avec l’accord de l’intéressé/é

– facilité par le déploiement du Dossier Médical Partagé (DMP)

PRENDRE LE TEMPS DE CONNAÎTRE LA PERSONNE, SES DIFFICULTÉS ET SES PROJETS, quelle que soit sa présentation

Oser aborder la vie quotidienne avec la personne : sommeil, activité physique, alimentation, vie sociale et sexuelle. Le quotidien renseigne sur les difficultés et permet d’adapter les stratégies de soins.

Comprendre le contexte social et familial de la personne, l’entourage étant un soutien essentiel pour une prise en soin globale. 
S’intéresser à la personne, à ses capacités/difficultés à se mobiliser pour agir selon ses souhaits/projets dans les différents domaines de sa vie (vie administrative, finances, logement, vie sociale et professionnelle, activités, famille).
S’APPUYER SUR LES PERSONNES RESSOURCES
La personne ressource incite, accompagne la personne dans son parcours de soins somatiques. Elle pallie les difficultés de la personne : organisation, rappels des RDV, stimulations, répétitions des consignes, parfois aide physique. Leur relation privilégiée encouragera la personne à s’engager plus activement dans son parcours de soin.

Ce tiers précieux pour les soins peut être : psychiatre, assistant social, éducateur, curateur, proches et pairs
aidants…

Même apparemment autonome, toute personne avec handicap psychique a besoin d’un accompagnement.

Soutenue, entourée, aidée , la personne devient actrice de ses soins, s’engage durablement dans les soins de façon effective ; sa qualité de vie est améliorée.

CLÉS POUR UNE PREMIÈRE CONSULTATION
• Je ne fais pas attendre la personne pour un  examen (anxiété++).
Je fixe le rendez-vous plutôt les après midi.
Je répète les consignes et informations de façon positive.
•J’informe la personne sur les soins à venir, la prévention en santé ; je l’incite à les suivre. si nécessaire, je propose un programme d’habituation aux soins (voir fiche HandiConnect F10 : l’habituation aux soins de la personne handicapée), ou autres moyens d’anxiolyse et/ou d’antalgie, médicamenteux (MEOPA…) ou non.
• Je propose un suivi rapproché : rdv téléphoniques, rdv de suivi du parcours de soin.
• Je propose une aide logistique, un découpage des actions (plan d’action).
• Je suggère une visite à domicile de la personne : très informative, elle favorise l’alliance thérapeutique.
• J’aide la personne à trouver de l’aide auprès de son entourage (ou des soignants).
 Je lui parle du Dossier Médical Partagé (DMP).
QUELS PARTENAIRES UTILES PEUT-ON SOLLICITER EN AMBULATOIRE ?
En cas de difficultés d’adhésion ou d’observance :

• Proposer et organiser le passage d’une Infirmière à domicile : prise de traitement, prise de sang à domicile.

• Contacter et s’appuyer sur l’aidant déjà identifié et /ou les soignants impliqués dans le suivi.

Solliciter une orientation MDPH vers un SAVS (Service d’Aide à la Vie Sociale ) ou un SAMSAH (Service d’Accompagnement Médico-Social pour Adultes Handicapés).

Solliciter un CSAPA (Centre de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie) quand la situation le nécessite.

Contacter les professionnels du soins psychiques : CMP (centre médico-psychologique), Hôpital de jour, psychiatre ou une équipe mobile.

Il existe aussi des services facilitant l’accès aux soins dans les centres hospitaliers – contacter le Centre ressource Handicap Psychique Régional (CREHPSY).

POUR EN SAVOIR PLUS

DOCUMENTATION
J. Bajcar et D. Leslie, « Task analysis of patients medication-taking practice and the role of making sens, a grounded theory study », Res Social Adm Pharm, vol. 2, no 1, 2006, p. 59-82
Guide d’appui pour l’élaboration de réponses aux besoins des personnes vivant avec des troubles psychiques, à destination des MDPH – CNSA, Avril 2017. Consulter
Guide qualité de vie, handicap, troubles somatiques et douleur – HAS, Mai 2017. Consulter
Guide d’amélioration des pratiques professionnelles : Accueil, accompagnement et organisation des soins en établissement de santé pour les personnes en situation de handicap – HAS, Juil 2017. Consulter
Recommandations de bonnes pratiques professionnelles : Spécificités de l’accompagnement des adultes handicapés psychiques, ANESM, Dec. 2015. Consulter
Recommandation de bonne pratique : Comment améliorer la prise en charge somatique des patients ayant une pathologie psychiatrique sévère et chronique – HAS-FFP.CNPP, Juin 2015. Consulter
 Recommandation de bonne pratique « l’accompagnement à la santé de la personne handicapée », Guide ANSM. Juin 2013. Consulter
Programme « psychiatrie et santé mentale  » de la HAS. Programme 2018-2023. Consulter

LIENS UTILES

Liste des programmes d’Education thérapeutique du patient (ETP), à consulter sur le site de son ARS.  Consulter

Pour se former : sensibilisation en santé mentale 2 jours de formation « premiers secours en santé mentale ». Consulter
Site d’informations, annuaires, sur la Santé Mentale. Psycom.org. Consulter
 Centre ressources régional dédié au handicap psychique. Consulter
Santé Mentale France. Consulter
Centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie, CSAPA Consulter et annuaire pour les trouver. Consulter
Les consultations dédiées handicaps (handiconsult, handiaccès, handisoins…) accueillent majoritairement des personnes avec troubles psychiques et/ou cognitifs, en échec de soins courants ailleurs.  Elles sont listées sur les sites des ARS.
HandiConnect.fr :

Handicap psychique : points de vigilance somatique. Consulter

Handicap psychique et Syndrome métabolique. Consulter

 Les violences faites aux personnes en situation de handicap – focus sur les violences
conjugales et les violences sexuelles. Consulter

 Suivi gynécologique. Consulter

 Suivi bucco-dentaire. Consulter

SanteBD.org pour expliquer la santé avec des dessins et des mots simples : Fiches alcool, tabac, Activité Physique Adaptée (APA), alimentation, gynécologie, dentaire, dépistage cancer, Dossier Médical Partagé. Consulter
ASSOCIATIONS PATIENTS/FAMILLES

L’ Union Nationale de Familles et Amis de personnes malades et/ou handicapées
psychiques (UNAFAM). Consulter

L’ Association Francophone des Médiateurs de Santé-Pairs (AFSMP). Consulter

Contributeurs

Cette fiche a été co-construite et validée par le groupe de travail « handicap psychique » dont les membres sont : Dr Cédric Bornes (GHU Paris psychiatrie et neurosciences), Matthias Broucqsault (Fondation de l’OEuvre Falret), Dr Anne Chastel-Bourguet» (Fondation l’Élan Retrouvé), Dr Astrid Chevance (Fondation Deniker), Pr Emmanuelle Corruble (Hôpital Kremlin Bicêtre), Dr Michel Delcey (Société Française Consultations Dédiées Handicap –SOFCODH), Dr Anne Gross (cabinet de psychiatrie en libéral), Sophie Deloffre (Centre Ressources Handicap Psychique -CREHPSY Pays de la Loire), Delphine Detton, infirmière ETP, Dr Nabil Hallouche (Association Nationale pour la Promotion des Soins en Santé Mentale –ANP3SM), Dr Denis Leguay (Santé Mentale France), Dr Cédric Lemogne (Hôpital Européen George Pompidou), Philippe Maugiron (Association Francophone des Médiateurs de Santé-Pairs – AFMSP), Anne Plantade (études en santé Publique), Elisa Pontillon (Service d’Accompagnement à la Vie Sociale – SAVS Falret), Marie-Jeanne Richard (Union Nationale de Familles et Amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques – UNAFAM), Dr Djéa Saravane, (SOFCODH, Handidactique), Dr Jocelyne Viateau (UNAFAM), Bérénice Staedel (Centre Collaborateur de l’Organisation Mondiale de la Santé pour la recherche et la formation en santé mentale_ CCOMS Lille).

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Sa réalisation et sa mise en ligne en accès libre ont été rendues possibles grâce aux soutiens de la CNSA, de l’Assurance-Maladie et des Agences Régionales de Santé.

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