N°S7 – Tous professionnels de santé

LES VIOLENCES FAITES AUX PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP (ADULTES) : FOCUS SUR LES VIOLENCES CONJUGALES ET VIOLENCES SEXUELLES

Dernière mise à jour : Avril 2023

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INFORMER > SIGNALER > ORIENTER

CONSTAT :

Les personnes en situation de handicap sont davantage victimes de violence et particulièrement les femmes.

La situation de handicap accroît le risque de violences.

En Europe, 4 femmes en situation de handicap sur 5 subissent des violences et/ou maltraitances de tout type 1.

35 % des femmes en situation de handicap subissent des violences physiques ou sexuelles de la part de leur partenaire, contre 19% des femmes dites valides 2.

Près de 90% des femmes avec un trouble du spectre de l’autisme déclarent avoir subi des violences sexuelles, dont 47% avant 14 ans 3.

27% des femmes sourdes ou malentendantes déclarent avoir subi des violences au cours de leur vie 4.

Peu d’études sur les violences faites aux hommes en situation de handicap 5.

LES VIOLENCES, DE QUOI PARLE-T-ON ?

VIOLENCES SEXUELLES =
Tous actes sexuels (attouchements, caresses, massages, main baladeuse, actes avec ou sans pénétration…) commis avec violence, contrainte, menace ou surprise ainsi que les actes relevant du harcèlement sexuel.
Portant atteinte à l’intégrité physique et psychique de la victime.
Ces actes sont subis et non désirés par la victime.
Un « rapport sexuel normal » peut correspondre à un viol à partir du moment où le partenaire le refuse.

VIOLENCES CONJUGALES =

À ne pas confondre avec les disputes ou conflits d’un couple (où deux points de vue s’opposent dans un rapport d’égalité).

Rapport de domination et de prise de pouvoir de l’agresseur sur la victime (dominant/dominé et toujours dans le même sens).

Récurrentes, s’aggravent et s’accélèrent avec le temps pouvant aller jusqu’au féminicide/homicide.
Quelle que soit la configuration conjugale (union libre, pacs, mariage…).
Pendant la relation, au moment de la rupture ou après la fin de cette relation.

Ces formes de violences sont multiples et le plus souvent se cumulent :

• Violences psychologiques : menaces, contrôle, pressions psychologiques, humiliations, dénigrements, harcèlement, manipulations, contraintes, utilisation de la situation de handicap (ex : confiscation par un tiers de la canne de déplacement d’une personne non voyante, dévalorisation de la personne du fait de son handicap « tu ne comprends jamais rien », « tu comprends ce qui t’arrange » à une personne sourde qui n’a pas accès à toutes les informations (discussion, communication téléphonique, entretien médical, etc…)).

• Violences sexuelles  : viol, tentative de viol, agression sexuelle, atteinte sexuelle, voyeurisme, mutilation sexuelle, harcèlement sexuel, rites initiatiques humiliants…

• Violences physiques : atteintes à l’intégrité corporelle, violences avec ou contre des objets, (ex : gestes inadaptés au moment des soins).

• Violences verbales : injures, hurlements, silences.
• Violences liées à la parentalité : dévalorisations du rôle parental du fait du handicap.
• Violences économiques : privation de ressources, de l’autonomie financière.
• Violences administratives : confiscation de documents (carte nationale d’identité, livret de famille, carnet de santé…).
• Cyber violences : usage des outils numériques (téléphones portables, internet, …) pour surveiller, contrôler, humilier.
Les formes de violences sont les mêmes qu’en population générale, néanmoins la situation de dépendance (physique, économique, financière…) dans laquelle se trouve une personne en situation de handicap, peut favoriser les situations d’emprise et de domination.
COMMENT REPÉRER LES VIOLENCES ?

Les violences concernent tous les âges, tous les milieux.

Il n’existe pas de portrait type de la victime ni de l’agresseur.

• POSER LA QUESTION DE MANIÈRE SYSTÉMATIQUE ET QUAND LA PERSONNE EST SEULE

• La meilleure question est celle que l’on se sent capable de poser :

– Avez-vous subi des violences dans l’enfance, au travail, dans votre couple ?

– Comment se comporte votre partenaire avec vous ?

– Comment cela se passe-t-il quand votre conjoint n’est pas d’accord avec vous ?

– Avez-vous peur de votre conjoint ?

– Comment ça se passe avec la personne qui vous aide ?

– Est-ce que vous avez subi des évènements qui vous ont fait mal et qui continuent à vous faire du mal aujourd’hui ?

– Est-ce qu’on vous a déjà fait mal à cet endroit ?

– Est-ce que vous avez eu peur de mourir ?

• REPÉRER LES CONSÉQUENCES PSYCHO-TRAUMATIQUES DES VIOLENCES :

• Une situation émotionnelle incontrôlable, un stress extrême peuvent entraîner une « disjonction » du cerveau :

– une anesthésie psychique et physique/sidération : la personne peut être dans l’incapacité de parler, bouger. Elle est tétanisée, immobile, silencieuse.

– une dissociation : conscience altérée, impression d’être spectatrice d’elle-même.

– une mémoire traumatique : certaines scènes ou sensations négatives stockées dans la mémoire de la victime mais ne sont pas traitées et analysées par le cerveau.

• Trouble de stress post-traumatique : état d’hyper vigilance malgré l’absence de danger imminent, état dépressif avec risque de suicide, troubles du sommeil/cauchemars, troubles de l’attention et de la concentration, conduites addictives (médicament, alcool, drogues, tabac, psychotropes…) et ou des conduites à risques, comportements inadaptés et/ou disproportionnés envers les autres, déconnexion de ses émotions.

Les attitudes et discours de la victime peuvent déstabiliser le professionnel : confusion, banalisation ou minimisation des violences donnant l’impression d’avoir consenti à celles-ci, attitude semblant détachée des faits… Ce sont en réalité les conséquences des violences subies.

CLIGNOTANTS LORS D’UNE CONSULTATION :
Patient inerte, sans appréhension de l’examen, patient qui se déshabille trop vite ou refus de se déshabiller.
Excuses répétées en consultation.
Attitude clinique : prostration ou au contraire logorrhée.

Aspects non verbaux (gestes, regards, attitudes, pleurs, pâleurs, mimiques, changement de comportement soudain…).

Le/la partenaire aidant répond systématiquement à place de la personne et refuse de la/le laisser seul.e avec un tiers.
Problèmes de santé chroniques, blessures à répétition, différentes formes de dépendance (alcool, stupéfiants, médicaments,…), tentative de suicide, dépression, variation de poids inexpliquée.
Patient ne peut expliquer les blessures/chutes ou ne veut pas en parler.
Situation de dépendance de la personne en situation de handicap et notamment sa dépendance économique.
Privation de la gestion de son budget et/ou de ses papiers par son/sa partenaire.
POINTS DE VIGILANCE HANDICAP

• Les violences sont sévèrement punies par la loi (comme leur non-dénonciation)
et le handicap de la victime est une circonstance aggravante.

Les symptômes post-traumatiques qui résultent des violences sont souvent mis à tort sur le compte du handicap.

• Il faut lutter contre les stéréotypes liés au handicap (parole moins crédible, pas de vie en couple….).

• Les conséquences de ces violences peuvent accentuer le handicap initial intensifiant encore la vulnérabilité.

• Certaines situations de dépendance peuvent constituer un frein à la libération de la
parole
car dénoncer = prendre le risque pour la personne victime de perdre l’aide au
quotidien et de se retrouver dans une situation de vulnérabilité encore plus grande.

QUE FAIRE EN CAS DE VIOLENCE ?
• ÉCOUTER ET CROIRE LA VICTIME :
« Vous n’y êtes pour rien/l’agresseur est le seul responsable/la loi interdit et punit les violences ».
Être attentif au langage corporel, au changement de comportement et d’autant plus si la personne a des difficultés d’expression.
Recourir à des supports pédagogiques, si besoin, rédigés en facile à lire et à comprendre pour permettre d’engager un dialogue sur les notions d’emprise et de consentement (la personne n’a pas forcement conscience d’être une victime).
• REMPLIR UNE UN CERTIFICAT MÉDICAL OU UNE ATTESTATION*
• ORIENTER :

En cas de danger imminent : mise à l’abri (police, hôpital ou autres sources d’hébergement), signalement au procureur (pour les violences conjugales, autorisation de lever du secret médical si danger immédiat et si la victime est sous l’emprise de son auteur > loi du 30 juillet 2020, cf. § Pour en savoir plus).

Pas de danger immédiat :
informer la victime de l’existence du 3919, des associations locales, et de la plateforme de signalement en ligne.
respecter le temps de la victime : prendre le temps d’écouter ce qui vient d’être révélé par la personne.

* CERTIFICAT MÉDICAL OU ATTESTATION :

COMMENT, PAR QUI ET POURQUOI ?

Éléments probants pour la victime pour engager une démarche judiciaire et obtenir une mesure de protection (une ordonnance de protection, l’attribution d’un téléphone grave danger…).
Établi à la demande de la personne victime mais aussi de la police, la gendarmerie, du procureur de la République. Pas d’obligation de le remettre à la personne victime le jour de la consultation, sauf si elle le demande (Décret N°2021-364 en date du 31 Mars 2021). Ne pas le donner à un tiers. Toujours garder une exemplaire dans le dossier du patient.
Peut être rempli par un médecin, une sage-femme, un chirugien-dentiste, un masseurkiné, un(e) infirmier(e), un travailleur social.

Modèles et instructions pour le remplir : https://arretonslesviolences.gouv.fr/je-suis-professionnel/les-ecrits-professionnels, si photos d’éventuels traumatismes physiques,
les faire si possible avec le visage de la personne.

POUR EN SAVOIR PLUS

SOURCES :

1 Résolution du Parlement Européen du 26 avril 2007 sur la situation des femmes
handicapées dans l’UE 2006/2277 (INI) consulter

2 Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne «violence against women an EUwide survey», 2014 consulter

3 Congrès de l’encéphale 2019 – Paris, par le Dr David Gourion, Mme Séverine Leduc et Mme
Marie Rabatel consulter et Résultats de l’étude menée en 2018 : consulter

4 Baromètre Santé sourds et malentendants 2011/2012 consulter

5 Études et Résultats – DREES – Juillet 2020 consulter

DOCUMENTATIONS :
Recommandations HAS : repérage des femmes victimes de violence au sein du couple, Déc. 20, consulter
Statistiques détaillées dans la lettre de l’observatoire national des violences faites aux femmes – Nov 20, consulter
Le guide pratique de la MIPROF « les violences faites aux femmes en femmes en situation de handicap : Repérer les violences, accompagner, prendre en charge, orienter la victime ». Site gouvernemental d’information, consulter
Observatoire régional (IDF) des violences faîtes aux femmes : consulter
Secret médical et violences au sein du couple : guide pratique visant à éclairer les professionnels de santé, en particulier les médecins, sur l’évolution de l’article 226-14 du Code pénal. Conseil National de l’Ordre des médecins : consulter
Loi du 30 juillet 2020 consulter
Le cycle de la violence conjugale, sur le site de Solidarités-Femmes_Loire Atlantique : consulter
Loi sur la non dénonciation de crime : consulter
ASSOCIATIONS/RESSOURCES :
Association Mémoire Traumatique et Victimologie : formation, information et recherche sur les conséquences psychotraumatiques des violences consulter
Femmes pour le Dire Femmes pour Agir : Écoute Violences Femmes Handicapées, consulter
Association Francophone de Femmes Autistes consulter

Association Femmes Sourdes Citoyennes et Solidaires consulter

Centres ressources régionaux handicap « vie intime, affective, sexuelle et de soutien à
la parentalité appelés centres INTIM’AGIR.

Annuaire du site Arretonslesviolences.gouv.fr consulter

Centre ressources pour les professionnels de santé intervenant auprès d’auteurs de
violences sexuelles consulter

Cartographie des dispositifs d’accueil et des associations oeuvrant pour les droits des femmes en IDF consulter

Maison des Femmes de Paris (permanence physique avec des professionnels qui pratiquent en Langue des Signes Française), CASAVIA (Centre d’Accueil en Santé sexuelle et de lutte contre les violences à l’APHP site La Pitié Salpêtrière, Paris), Maison des Femmes de Saint Denis (93), Maison des Femmes de Bordeaux, Maison des Femmes à Marseille

Observatoires territoriaux des violences faites aux femmes consulter
OUTILS :
SantéBD : pour communiquer de façon simple et illustrées consulter
Vidéos LSF :
– les différences entre violences et conflits (MIPROF) consulter
– les mécanismes des violences au sein du couple (MIPROF) consulter

– réagir peut tout changer (les démarches et +) : consulter

Formation-sensibilisation

– Modules auto-formatif en ligne (e-learning) gratuit : Dépister, signaler et prévenir les violences sexuelles faites aux personnes handicapées consulter

– Malette pédagogique avec un kit de formation (courts métrages et livrets d’accompagnement) consulter
– Déclic violence : aide à la prise en charge des violences conjugales envers les femmes en médecine générale consulter

– Suivi et soins gynécologiques des femmes en situation de handicap : cf. fiche HandiConnect « Quand passer le relais ? » consulter

– Les mesures de protections juridiques des majeurs vulnérables : cf. fiche HandiConnect consulter

Témoignages
– D’une femme autiste consulter

– Intervention présidente AFFA Journée de sensibilisation des violences faites aux femmes du Réseau de Santé Périnatal Parisien (RSPP) consulter

NUMÉROS UTILES :
114 numéro d’appel d’Urgences pour les personnes sourdes, malentendantes, aphasiques, dysphasiques ou sur https://www.info.urgence114.fr/
Écoute Violences Femmes Handicapées FDFA 01 40 47 06 06 ou ecoute@fdfa.fr

3919 Violences Femmes Info : numéro d’écoute national destiné aux femmes victimes de violences et à leur entourage ainsi qu’aux professionnels concernés. Anonyme et gratuit, accessible via un interprète en LSF, par le relais téléphonique RogerVoice. Le 3919 n’est pas un numéro d’appel d’urgence.

Plateforme d’écoute pour les sourds et malentendants : SOS Surdus consulter

Fil santé jeunes (12 – 25 ans) : consulter

Plateforme de signalement : sous la forme d’un tchat, un accueil personnalisé et adapté par une policier ou un gendarme spécifiquement formé à la prise en charge des victimes de violences sexuelles et sexistes.
Accessible 24h/24 et 7j/7 via le site internet https://www.interieur.gouv.fr/Actualites/Infospratiques/ Signalement-des-violences-sexuelles-et-sexistes, sans obligation de déclarer son identité, la victime pourra, au cours un échange individualisé, signaler les faits de violences sexuelles et/ou sexistes qu’elle a subi et pour lesquels elle est en recherche d’informations, de conseils ou d’assistance.

Contributeurs

Cette fiche a été coconstruite et validée par le groupe de travail HandiConnect « Lutte contre les violences » dont les membres sont : Marie Conrozier (chargée de mission, Femmes pour le Dire, Femmes pour Agir), Pr Henry Coudane (professeur Emérite de Médecine légale et Droit de la santé CHRU Nancy), Pr Marc Dommergues (gynécologue-obstétricien, chef de service, hôpital La Pitié Salpétriêre-APHP), Nathalie GAM (sage-femme libérale), Delphine Giraud (sage-femme, service de gynécologie obstétrique Hôpital Pitié Salpêtrière, APHP), Dr Valérie Ledour (responsable santé sexuelle et reproductive PMI Paris), Frédérique Perrotte (sage-femme), Marie Rabatel (présidente de l’Association Francophone des Femmes Autistes), Florence Rollet (conseillère technique mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains -MIPROF).

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Sa réalisation et sa mise en ligne en accès libre ont été rendues possibles grâce aux soutiens de la CNSA, de l’Assurance Maladie et des Agences Régionales de Santé.

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