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N°H15 – Diététiciens – Tous professionnels de santé
LES TROUBLES DU SPECTRE DE L'AUTISME (TSA) : LA PRISE EN CHARGE DIÉTÉTIQUE
• Les particularités de fonctionnement des personnes présentant des TSA peuvent influencer leurs comportements alimentaires et les temps de repas, c’est le cas de plus de 80% des enfants avec un TSA (1).
• Chez ces personnes, on retrouve une prévalence plus élevée de troubles gastro-intestinaux, troubles du sommeil, TDAH, épilepsie, comorbidités psychiatriques (2).
• Les conséquences sur le plan nutritionnel et social nécessitent une prise en charge pluridisciplinaire dont diététique et ce, dès le plus jeune âge.
• Les troubles peuvent être aggravés par d’autres problèmes moteurs associés.
LES INFLUENCES POSSIBLES DES TSA SUR LA PRISE ALIMENTAIRE
• Altérations sensorielles dans 90% des cas (3) : hyper/hyporéactivité aux stimulations sensorielles (goûts, textures, aspects visuels, odeurs, sons de la mastication des aliments) et à l’environnement (luminosité, bruit…). Difficultés à percevoir ses besoins (faim, soif, satiété…), aspect visuel (séparation des couleurs…). Le temps de repas sollicite de multiples fonctions et sens dont la gestion et la coordination peuvent être complexes et engendrer de la frustration voire des « comportements défis »*.
• Intérêts spécifiques et restreints : en partie liés à la peur de la nouveauté, la personne présente une forte propension à ne consommer des aliments que sous une certaine forme ou texture ; ou que certains aliments d’une marque spécifique… Cette peur peut également être tournée vers l’environnement non contrôlé du repas pouvant être source d’anxiété.
• Néophobie alimentaire* : besoin que les choses soient immuables, adhésion inflexible à certaines routines, saveurs, recettes, aliments/goûts précis…
• Difficultés dans les fonctions exécutives : initiation, organisation, inhibition.
• Trouble des interactions sociales : les interactions sociales peuvent rendre anxiogène le temps de repas, qui est (en général) un temps de socialisation.
• Difficulté de mastication et / ou de déglutition : fréquentes chez les TSA, ces difficultés se retrouvent chez de nombreuses populations (exemple : fausse-route, la personne a un défaut de fermeture des voies aériennes qui engendre un passage d’aliments liquides ou solides dans les poumons).
• Un trouble somatique ou une douleur peut perturber l’alimentation et ne pas être identifié à cause d’un trouble de la communication (du fait de l’absence de demande d’aide et l’absence d’identification de la douleur chez les personnes avec TSA).
• Également, chacun a des représentations alimentaires fondées sur son expérience et parfois un aliment peut être associé à une image spécifique. Si l’image de l’aliment présenté ne correspond pas à la perception de la personne ou ce à quoi elle a été habituée, il peut y avoir une incompréhension (notamment dans l’utilisation de pictogrammes).
LES CONSÉQUENCES POSSIBLES
• Difficultés d’intégration de nouveaux aliments : répertoire alimentaire restreint et risque éventuel de carences
• Difficultés d’adaptation des repas en famille ou en collectivité
• Temps de repas socialement compliqués
• Risques de surpoids et obésité (pouvant également être influencé par la prise de neuroleptiques) ou à l’inverse une perte de poids voire dénutrition
• Troubles du comportement alimentaire
• Trouble PICA (trouble du comportement alimentaire caractérisé par l’ingestion durable (pendant plus d’un mois) de substances non-nutritives et non-comestibles : terre, papier, sable…)
• Accompagnement à l’alimentation voire dépendance pour se nourrir
Le type de carence alimentaire et la gravité des répercussions sociales (pour la personne et son entourage) peuvent varier de légères à sévères. Le passage à une alimentation solide et variée peut être très difficile pour un un nourrisson présentant des traits autistiques.
LES CLÉS POUR UNE PREMIÈRE CONSULTATION
Consulter la fiche HandiConnect H10 « Points de vigilance clinique associés aux troubles du spectre de l’autisme » Voir la fiche
LEVIERS D’ACTION POSSIBLES
AVANT TOUT
Bilan orthophonique (bilan déglutition et mastication), bilan dentaire, réalisation d’un profil sensoriel.
PRISE EN CHARGE PLURIDISCIPLINAIRE
Aidants familiaux et/ou professionnels, éducateurs, rééducateurs, professionnels de santé…. Ex : le rôle de l’ergothérapeute (adaptation d’outils, de l’environnement et des ustensiles du repas), du psychologue, du dentiste… Il y a une gestion sensorielle des repas en équipe. Veiller à ce que les bonnes pratiques diététiques soient comprises et reprises par tous.
agir sur l’environnement et le matériel
Créer un environnement facilitant pour la personne (fond sonore ou silence absolu, épurer l’environnement visuel, ajout de balle de tennis sur les pieds des chaises pour diminuer les bruits lorsqu’elles sont déplacées, tables ergonomiques…). Un travail d’adaptation du matériel est parfois nécessaire (assiette d’une certaine couleur ou forme, couverts plus lourds ou d’une forme adaptée…).
L’adaptation de l’environnement et du matériel demande de bien connaître la personne concernée et son profil sensoriel pour rendre le temps de repas le moins anxiogène possible augmenter la réceptivité de la personne.
RITUALISER
Ritualiser au maximum pour limiter les changements (temps de repas, type de couverts, placement à la table…). Le seul changement doit être l’aliment nouveau. Possibilité d’utiliser un minuteur (ou Timer) ou encore des pictogrammes. d’une certaine couleur ou forme, couverts plus lourds ou d’une forme adaptée…).
LA PRÉSENTATION DES ALIMENTS
Séparer les aliments dans l’assiette et éviter les plats en sauce. Cela permet de diminuer l’effort visuel et sensoriel. Alterner les formes et textures des aliments que la personne apprécie et les présenter sous différentes formes (ex : pour la pomme de terre, possibilité de la faire en purée, en salade, en morceaux, à la poêle, et si la personne aime la texture de la purée, essayer différents légumes en purée) pour éviter que la personne se lasse et pour travailler la flexibilité.
L’INTRODUCTION DU NOUVEL ALIMENT
Commencer par un aliment que la personne est susceptible d’apprécier.
> Augmenter progressivement la quantité de l’aliment.
Afin que sa présence soit tolérée par la personne, présenter le nouvel aliment sur sa table… puis proche de son assiette, le laisser manipuler (toucher, sentir, regarder)… puis peu à peu l’inciter à introduire dans sa bouche l’aliment jusqu’à son acceptation. Cela peut être long et parfois nécessiter de s’y reprendre à 20, 30 ou 40 reprises.
Veiller à la généralisation des pratiques sur tous les lieux d’accueil de la personne. Ne pas essayer de cacher les aliments qu’il déteste (peut développer de la méfiance).
POSTURE À ADOPTER
Toujours encourager et féliciter la personne, la motiver par l’utilisation de renforçateurs*. Rester bienveillant, car la personne peut avoir beaucoup de difficultés.
En cas de « comportement défis », il vaut mieux proposer à la personne de quitter la table pour qu’elle puisse s’apaiser plutôt que d’insister et de la contraindre. Les rigidités alimentaires ne sont pas des caprices ou une tentative de manipulation de la part de la personne.
Attention à ne pas mettre trop de pression. Les repas doivent rester un moment agréable. À chacun de doser en fonction des résultats et de l’effort que cela représente pour la personne. Le repas doit être associé autant que possible à un moment positif, à une expérience agréable. Le vécu positif de la situation entraînera moins de réticence de la part de la personne avec TSA envers les repas.
L’utilisation de renforçateurs alimentaires ne devrait pas être systématique et doit être utilisée avec une vigilance portée sur la qualité et la quantité afin d’éviter les problématiques alimentaires pouvant être engendrées par ces renforçateurs. Par exemple, donner une tablette de chocolat à chaque fois que la personne arrive à s’habiller seule n’aura pas le même impact que si le renforçateur est une miette de chips.
L’impact sur la santé de l’utilisation du renforçateur est à prendre en compte.
POUR EN SAVOIR PLUS
RÉFÉRENCES
(1) Guide ALIMENTATION & BIEN-ÊTRE / Autisme, des enfants bien dans leur assiette, ANNECLAUDE LUISIER, Groupe Apricil, Institut Paul Bocuse, Recherche Science et Innovation collaboration avec le Centre de recherche de Neurosciences de Lyon, l’Université de Fribourg et l’Université Claude Bernard Lyon 1, octobre 2020, consulter
(2) Recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS), Trouble du spectre de l’autisme Signe d’alerte, repérage, diagnostique et évaluation chez l’enfant et l’adolescent, Fév. 2018 consulter
(3) Volkert, V.M. and Vaz, P.C. (2010) Recent Studies on Feeding Problems in Children with
Autism. Journal of Applied Behavior Analysis, 43, 155-159. consulter
Recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) Trouble du spectre de l’autisme :
interventions et parcours de vie de l’adulte, Déc. 2017. consulter
DÉFINITIONS
• « Comportements-défis » : comportements qui déstabilisent à des degrés divers la personne
qui en est victime et ses proches (aidants familiaux et/ou professionnels). consulter
• La néophobie alimentaire : la néophobie alimentaire est la peur de goûter de nouveaux
aliments. Elle touche surtout les enfants de 2 à 10 ans. Cette crainte est banale, chacun
de nous a éprouvé cette réticence à mettre dans sa bouche un aliment inconnu. Cette peur
correspond généralement à un stade de développement de l’enfant, mais chez la personne
présentant un TSA, elle peut durer dans le temps. consulter
• Renforçateur : processus par lequel une conséquence agréable rend un comportement
plus probable (renforçateurs alimentaires, sociaux, matériels…)
OUTILS
• Tableau des fruits et légumes, j’aime, j’aime pas consulter
• Tableau d’Inventaire alimentaire consulter
• Cahier des aliments consulter
• Améliorer la communication à table consulter
• Alimentation & autisme des idées pour aménager et adapter le temps du repas consulter
VIDÉOS
• « Pourquoi, pour certains autistes, se nourrir est un combat » consulter
• « La sélectivité alimentaire chez la personne autiste » consulter
CONTRIBUTEURS
Cette fiche a été co-construite à l’initiative de la fondation OVE dans le cadre de son projet Hand’Alim et validée par le groupe de travail HandiConnect « Autisme – suivi diététique » dont les membres sont :
Josette Bonin et Anne Freulon (parents), Dr Contejean (pédopsychiatre, Centre Ressource Autisme Ile-De-France_CRAIF), Dr Bénédicte Gendrault (médecin ressource CoActis Santé), Coline Girerd (diététicienne et formatrice libérale), Tiphaine Grelier (infirmière Équipe Mobile Somatique Autisme CRA Aquitaine), Joséphine Hautin (psychomotricienne, Fondation OVE), Lucie Jassen (orthophoniste, CHRU Strasbourg), Virginy Jegat-Bonnot (chargée de mission insertion sociale et professionnelle CRAIF), Aurore Kiesler (éducatrice, fondatrice et présidente d’Autismes Aujourd’hui), Sarah Saïd (chargée de mission pôle ressource TND, Fondation OVE), Dr Djéa Saravane (Médecin spécialiste de la douleur, président de la Société Française de Consultations Dédiées Handicap-SOFCODH), Larissa Santos (psychologue CRAIF, ENVOLUDIA), Priscillia Valentin (diététicienne libérale), Benjamin Verger (Chef de projet Santé, CRAIF). Rédacteur : Jérémie Pelet (diététicien nutritionniste, Fondation OVE).
MENTIONS Légales
Sa réalisation et sa mise en ligne en accès libre ont été rendues possibles grâce aux soutiens de l’Assurance Maladie, de la CNSA et des Agences Régionales de Santé.
HandiConnect est un projet porté par l’association CoActis Santé et ses partenaires. Tous droits de reproduction, de représentation et de modification réservés sur tout support dans le monde entier. Toute utilisation à des fins autres qu’éducative et informative et toute exploitation commerciale sont interdites. ©CoActis Santé
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