N°H63 – Professionnels de rééducation 

PARALYSIE CÉRÉBRALE (PC) : REPÈRES POUR LA RÉÉDUCATION ET LA RÉADAPTATION FONCTIONNELLES

Dernière mise à jour : Juin 2022

OBJECTIF GLOBAL DE LA RÉÉDUCATION

FONCTIONNELLE DE LA PERSONNE AVEC PC

L’accompagner dans la réalisation d’un projet de vie la plus autonome possible, selon une approche multidimensionnelle, et coordonnée, visant à :
• Favoriser sa participation en s’appuyant sur ses compétences et ses motivations et en prenant en compte son environnement (humain, physique, social et d’attitudes), dans tous les domaines de son quotidien (scolarité, vie professionnelle, activités, famille, vie affective…)
• Développer son activité fonctionnelle en valorisant ses potentialités cérébro-motrices, perceptives et cognitives et en tenant compte de l’intrication des troubles
• Évaluer et prévenir la douleur et les troubles musculosquelettiques (TMS)

Cette approche s’appuiera sur la Classification Internationale du Fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF), qui fournit un cadre à l’évaluation et à l’élaboration du projet rééducatif. 

FAIRE CONNAISSANCE ET ÉTABLIR L’ALLIANCE THÉRAPEUTIQUE DANS LA DURÉE

COMMUNIQUER DIRECTEMENT AVEC LE PATIENT : 

• S’informer et s’adapter autant que possible à ses possibilités et aux outils de communication qu’il utilise

• Avoir à l’esprit que ses difficultés d’élocution n’ont sans doute pas de lien avec ses compétences cognitives

• Expliquer ce que l’on va faire avec des mots simples, accompagnés de gestes et/ou d’images, encourager les questions

• Lui demander si on peut le toucher, si besoin s’il est d’accord pour se dévêtir

QUESTIONNER LE PATIENT OU S’APPUYER SUR L’AIDANT POUR CONNAÎTRE : 

• Son parcours de vie et sa situation actuelle, son environnement psychosocial

• Son état de base (comportement, positionnements, crispations du corps, douleurs, alimentation, éliminations, sommeil, tristesse, retrait, …), ses antécédents spécifiques (médicaux et de parcours de vie)

Partager l’information :

• Alerter quand des signes cliniques semblent nécessiter une consultation médicale d’évaluation (perte de poids, comportement modifié, douleur…), en concertation avec le patient et ses aidants

• Partager le suivi et les bilans, via des outils numériques comme « mon espace santé »

• Ne pas hésiter à partager également , dans le respect du secret médical, avec tous les accompagnants (grand-parents, auxiliaire de vie, proches), ils peuvent être très investis

Verbatim : « Sans remettre en question les compétences du thérapeute, j’ai besoin d’être en confiance pour échanger avec lui sur les différentes méthodes de rééducation que j’envisage, avec lui et ailleurs. » Un parent

Prévoir des consultations à domicile et/ou en institution, à défaut, une téléconsultation, pour mieux appréhender l’environnement de vie du patient

La co-construction du projet 

de soins global

L’intrication des troubles nécessite un travail d’équipe transdisciplinaire, concerté avec le patient et/ou ses aidants, coordonné le plus souvent par le médecin MPR* ou le neuropédiatre. Le projet de soins doit être partagé par tous les intervenants (médico-social/ville/hôpital).

*MPR: Médecine Physique et de Réadaptation

Puce-01

Centrer le projet sur les souhaits du patient et/ou de ses aidants en considérant ses savoirs expérientiels

 

 

Puce-02

Établir un bilan structuré (potentialités, limites, ressources) en s’appuyant si possible sur des outils d’évaluation validés et spécifiques. Pour les fonctions motrices, ils sont disponibles dans les recommandations de la HAS (voir « pour en savoir plus »)

 

 

Puce-03

Définir des objectifs fonctionnels concrets, atteignables, mesurables et définis dans le temps, à visée préventive et/ou curative

– Un même objectif fonctionnel pourra être partagé par plusieurs professionnels, « Exemple d’accompagnement transdisciplinaire autour d’un objectifcommun »

– Réévaluer régulièrement ces objectifs (ex: nouveau besoin, travail, logement, loisirs…) avec le patient et/ou ses aidants

Puce-04

Définir avec le patient les étapes du projet de soins en fonction de ses compétences cognitives, de ses fragilités (difficultés attentionnelles, troubles mnésiques, fatigabilité…), des contextes émotionnels et environnementaux, et des priorités du moment

 

 

Puce-05

Proposer auto-rééducation et/ou guidance parentale, en complément des séances encadrées, afin de permettre la fréquence des exercices nécessaire à l’atteinte des objectifs

 

 

Puce-06

Informer sur les programmes d’«Éducation Thérapeutique du Patient » (ETP) pour aider le patient à gérer la chronicité de ses troubles (voir « pour en savoir plus »)

 

 

Puce-07

Participer, autant que possible, à la mise en place des appareillages et aides techniques (objectif, pertinence, confort), en les intégrant dans le contexte de vie, et en lien avec l’ensemble de l’équipe soignante

 

LES SPÉCIFICITÉS SELON LA PÉRIODE DE LA VIE

Pour les enfants 

• Débuter la rééducation le plus précocement possible (possibilité de financement par convention avec les PCO*)

• Des choix sont obligatoires entre les différentes interventions de rééducation et leur intensité, en fonction des priorités du moment, très variables au fil du temps

• Ne pas surcharger les emplois du temps, par exemple, 3 séances hebdomadaires au maximum pour un enfant scolarisé à temps complet

*PCO : Plateforme de Coordination et d’Orientation : dispositif national pour orienter les enfants présentant des signes de développement inhabituel, pour engager une intervention coordonnée et pour un accès au Forfait d’Intervention Précoce. Consulter

Chez l’adolescent

• Inclure les adolescents dans les choix thérapeutiques

• Lutter contre l’aggravation des TMS

• Accompagner autour des sujets de la vie affective et/ou sexuelle

 

Chez l’adulte

• Maintenir les acquis

• Encourager l’apprentissages de nouvelles compétences qui font sens pour le patient dans son quotidien

REPÈRES PRATIQUES

Détendre et rassurer en début de séance (manoeuvres de décontraction automatique…)

Donner à chaque exercice du sens et une utilité dans la vie quotidienne, rendre les séances motivantes et ludiques, les adapter à l’état actuel du patient (douleur, fatigue)

Donner du feedback au patient et à l’aidant

Adapter la fréquence des séances aux priorités du moment

MOUVEMENT, MOTRICITÉ, POSTURE

• Évaluer et prévenir les TMS secondaires
• Évaluer les troubles du tonus
• Installer dans une posture physiologique (surveiller particulièrement les hanches): proposer et faciliter l’utilisation des aides techniques et appareillages de fonction (siège adapté, attelles de marche…) et des orthèses de postures (orthèses suro-pédieuses …)
• Entrainer spécifiquement les tâches priorisées par le patient (se déplacer, manier des objets, effectuer ses transferts, marcher…)
• Favoriser l’engagement actif du patient
• Promouvoir un mode de vie actif et favoriser le renforcement musculaire

• Encourager l’Activité Physique Adaptée (APA)

• Utiliser des automatismes posturaux et antigravitaires pour susciter l’activité musculaire par la commande volontaire
• Guider l’enchaînement des mouvements du corps selon les niveaux d’évolution motrice (NEM) en modulant les feedback multimodaux (tactiles, visuels, auditifs, kinesthésiques, vestibulaires) et les rythmes d’action

SENSORIALITÉ, PERCEPTION

• Étayer/accompagner la perception du corps dans l’espace par les modifications tonico-posturales
• Étayer/accompagner les modulations du tonus et aider à mieux distinguer les états de tension et de relâchement
• Proposer des expériences sensorimotrices spécifiques avec les objets, ainsi permettre de mieux percevoir leurs matières, leurs formes, leurs propriétés

ALIMENTATION

Pour conserver un bon état nutritionnel et respiratoire, et garder le plaisir du repas :

• Ajuster la posture et le positionnement lors des repas pour éviter les fausses routes : flexion de la tête et inclinaison postérieure du tronc
• Adapter les textures et les goûts aux capacités de succion, mastication, déglutition
• Surveiller les RGO*
• Gérer les difficultés comportementales associées à la nourriture (pouvant venir d’une dysoralité sensorielle)
• Prendre en charge l’incontinence salivaire : thérapie oro-faciale, soins pré et post toxine dans les glandes salivaires

*RGO : Reflux Gastro-OEsophagien

COMMUNICATION VERBALE

• Évaluer les compétences du patient : observations cliniques et écologiques sous un angle qualitatif, puis quantitatif ; épreuves étalonnées nécessitant souvent une adaptation des épreuves au profil singulier du patient

• Avoir en tête, qu’aux troubles directement consécutifs de la PC (ex. dysarthrie), peuvent s’associer des troubles qui s’apparentent aux troubles développementaux du langage

• Éviter un suivi strictement oraliste pour ne pas laisser se creuser le décalage entre la compréhension et l’expression, proposer des outils de communication alternative adaptés et personnalisés lorsque la parole articulée est déficitaire : approche multimodale associant différents canaux ; verbal, visuel, corporel (Communication Alternative et Augmentée, CAA)

• Impliquer l’entourage et le corps enseignant dans le projet (sensibilisation, formations…)

COGNITION

• Ne pas négliger les troubles « dys » au profit unique de la rééducation motrice

• Un certain nombre de troubles « dys » peuvent être masqués par ou confondus avec les troubles moteurs, praxiques, neurovisuels

• Adapter les conditions de passation des bilans cognitifs aux troubles sensori-moteurs spécifiques du patient. 

(ex : attention à la gêne due aux troubles moteurs pour le versant non verbal du bilan)

• Il peut exister des troubles spécifiques de l’attention, qu’il ne faut pas confondre avec ceux induits par la fatigabilité

• Tenir compte des difficultés de mémorisation. Certaines sont liées aux traitements anti-comitiaux

• Les troubles cognitifs peuvent être spécifiques ou plus ou moins globaux, ils doivent être bien explorés et compris pour favoriser la scolarité et la vie professionnelle.

PSYCHISME

• La construction de l’identité peut être rendue difficile par le handicap. Soutenir l’estime de soi et l’autonomie psychique

AUTONOMIE ET ACTIVITÉS QUOTIDIENNES

Évaluer le niveau de participation dans les activités de la vie quotidienne (AVQ) : se laver, s’habiller, porter des couverts à la bouche…
• Proposer des activités basées sur les centres d’intérêt pour solliciter les mouvements de coordinations et développer l’autonomie (ex : jeux de cartes, activités créatives, cuisine, jeux vidéos, …)
Faciliter la participation aux AVQ : en tenant compte des capacités et des limites, adapter des outils et entraîner à leur utilisation (ex : développer un pointage efficace pour l’utilisation des outils de CAA, commande de fauteuil électrique…)

POUR EN SAVOIR PLUS

Références

HAS, recommandations de bonnes pratiques. 2021. Rééducation et réadaptation de la fonction motrice de l’appareil locomoteur des personnes diagnostiquées de paralysie cérébrale.  consulter

• Recommandations de bonnes pratiques de rééducation : quel rôle pour la recherche ? “Les cahiers de la recherche N°30”, mai 2022, la Fondation Paralysie Cérébrale. consulter

• Charte de la rééducation/réadaptation des personnes avec paralysie cérébrale. consulter

Quelle rééducation en kinésithérapie pour la paralysie cérébrale de l’enfant ? Audrey Fontaine. Article sur le site de l’ordre des MK. consulter

• Mieux prendre en compte les troubles cognitifs. Interview de Joel Fluss, in “Les cahiers de la recherche N°28”, 2021, la Fondation Paralysie Cérébrale consulter

Apprentissages, M. Mazeau. in « Comprendre la Paralysie Cérébrale et les troubles associés. » D. Truscelli et col. Elsevier Masson 2017
Langage et communication, B. Aupiais in « Comprendre la Paralysie Cérébrale et les troubles associés. » D. Truscelli et col. Elsevier Masson 2017


outils

Présentation de la Classification Internationale du Fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF). Site de l’École des Hautes Études en Santé Publique (EHESP). consulter

Vidéo : Troubles de l’alimentation et de la déglutition de l’enfant paralysé cérébral. 2021, Amélie Scache. consulter

• Troubles de l’alimentation & Handicap mental sévère
– Pratiques – Document à destination des professionnels intervenant en établissements et services médico-sociaux et des familles. Site Réseau Lucioles.  consulter

Fiches R4P (Réseau Régional de Rééducation et de Réadaptation Pédiatrique en Rhône-Alpes) :

– Prise en charge non chirurgicale du membre supérieur spastique de l’enfant hémiplégique.
consulter


– Prise en charge du bavage chez l’enfant en situation de handicap. 
consulter

Kid’em.
Outil pour faciliter la communication et aider à la co-détermination d’objectifs thérapeutiques entre l’enfant et son thérapeute. 
consulter

• La thérapie Habit-ILE. consulter

• Qu’est-ce que l’ETP ? Explications sur le site de la HAS. consulter

DOCUMENTATION

Infirmité Motrice Cérébrale (IMC) / Paralysie Cérébrale : Besoins éducatifs particuliers. Site « Tous à l’école » (2015). consulter

Réflexions sur la pratique de l’ergothérapie chez l’enfant de moins de 6 ans, M. Mazeau, 2017, Revue Contraste n° 45, pp.37-60

Site d’une Association spécialiste de la Communication Augmentée et Alternative
(CAA) : ISAAC Francophone consulter

Tutoriels de rééducation :
– Manoeuvres de décontractions, quelques vidéos: consulter consulter consulter et – Livret d’auto-rééducation pour les jeunes enfants autonomes, membre supérieur. consulter

Liens vers des livrets d’auto-soins, sur le site de « patients avec paralysie cérébrale » consulter

• Comment solliciter le membre supérieur d’un jeune enfant atteint d’hémiplégie cérébrale ?
Document conseil R4P à l’attention des parents consulter

Site du réseau Cokillaje Pays de Loire, pour soutenir l’accompagnement, l’éducation thérapeutique, les rééducations et réadaptations des jeunes enfants présentant des anomalies de développement ayant une composante motrice. consulter

Contributeurs

Cette fiche a été co-construite et validée par le groupe de travail HandiConnect » Paralysie Cérébrale » dont les membres sont : Sophie Achille-Fauveau (ergothérapeute), Dr Catherine Allaire (neurologue, CHU de Rennes), Brigitte Aupiais (orthophoniste, Hôpitaux de Saint-Maurice), Dr Adriaan Barbaroux (médecin généraliste et enseignant, Université Nice Côte d’Azur ), Julia Boivin (personne atteinte de paralysie cérébrale), Laurent Bonnotte (psychomotricien, Institut de Formation en sychomotricité, Paris), Dr Antoine Chaanine (neuropédiatre, ARAIMC, Marseille), Delphine Chantelot (ergothérapeute, Hôpital Salvator, Marseille), Jean-Baptiste Cuiengnet (kinésithérapeute, réseau Cokillaje, Pays de la Loire), Dr Marie-Charlotte d’Anjou (médecin MPR, Réseau R4P), Josselin Démas (kinésithérapeute Angers, formateur à l’institut de formation du CH de Laval), Pr Mickaël Dinomais (médecin MPR, CHU Angers), Stéphanie Fauré (association « patients avec paralysie cérébrale », patients engagés), Audrey Fontaine (kinésithérapeute, cabinet « À Pas de Géants », Paris), Pr Philippe Gallien (médecin MPR, pôle Saint-Hélier), Delphine Ganne (parent), Dr Nathalie Genès (directrice scientifique, Fondation Paralysie Cérébrale), Dr Lucie Hertz- Pannier (administratrice de ENVOLUDIA, médecin chercheur, parent), Dr Michèle Mazeau (MPR, spécialiste en neuropsychologie infantile), Dr Claire Mietton (MPR pédiatrique, L’Escale, HFME, Lyon), Laure Nitschmann (parent), Dr Ana Presedo (chirurgien orthopédiste, Hôpital Robert Debré, Paris), Amélie Scache, (Orthophoniste), Pr Philippe Thoumie (MPR, Hôpital Rothschild, Paris), Philippe Toullet (kinésithérapeute, Institut Motricité Cérébrale), Jacky Vagnoni (parent, Paralysie Cérébrale France), Virginie Vagny (ergothérapeute), Dr Delphine Verollet (médecin MPR, Hôpital Raymond Poincaré, Garches). 

 

Nous souhaitons saluer ici la mémoire de Régine Scelles, psychologue clinicienne, professeure de psychopathologie, chercheuse, laboratoire Clipsyd, Université Paris Nanterre, qui nous a quittés en février 2022, qui a contribué activement aux précédentes fiches sur la paralysie cérébrale.

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