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N°F04 – Douleurs – Tous handicaps – Tous professionnels de santé
Douleurs de la personne dyscommunicante : rechercher les causes, les soulager

Les sujets abordés dans cette fiche:
- Quelles sont les pathologies douloureuses les plus fréquentes chez ces personnes ?
- Comment orienter l’examen clinique chez une personne qui ne peut s’exprimer ?
- Quels médicaments et moyens non pharmacologiques pour soulager les douleurs ?
Quelles sont les personnes concernées ?
De quelles douleurs parle-t-on ?
Les différents types de douleur :
- Douleur par excès de nociception : en lien avec une lésion somatique (traumatisme, infarctus, rhumatisme, soin avec effraction…)
- Douleur neuropathique : spécifique de lésions du Système Nerveux Somato-sensoriel Central ou Périphérique (après un zona, certaines chirurgies, un AVC, une anoxie cérébrale, …)
- Douleur médicalement inexpliquée : certaines céphalées, Syndrome Douloureux Régional Complexe de type I, douleurs musculo-squelettiques inexpliquées, douleurs abdominales récurrentes
- Douleur mixte : elle présente des composantes nociceptive, neurogène et psychogène (douleur cancéreuse, certaines douleurs post-opératoires
Soulager la douleur, quelles sont les règles ?
- Le traitement de la douleur, c’est avant tout sa prévention.
- La douleur est un symptôme dont le traitement est aussi celui de sa cause chaque fois que cela est possible.
- Le traitement de la douleur ne doit pas être retardé par la recherche de son étiologie.
- Le traitement est réévalué en cas d’inefficacité, arrêté dès lors qu’il n’est plus nécessaire.
Toute personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur. Celle-ci doit être en toute circonstance prévenue, évaluée, prise en compte et traitée.
Loi du 04/03/2002 revue le 22/04/2005
L’incapacité de communiquer verbalement ne nie en aucune façon la possibilité qu’un individu éprouve de la douleur et qu’il a besoin d’un traitement approprié pour soulager sa douleur.
IASP
Quelles sont les étiologies
Prévalence plus élevée chez la personne dyscommunicante de :
- Douleurs digestives : constipation chronique, reflux gastro-oesophagien, œsophagite, fuites autour de l’orifice de gastrostomie, maladie cœliaque
- Infarctus du myocarde : très fréquent chez les personnes avec handicap psychique du fait des comorbidités et de la prévalence du syndrome métabolique (voir la fiche HandiConnect.fr H21 | Handicap psychique : points de vigilance somatique)
- Atteintes musculo-squelettiques : scoliose, luxations articulaires, accès spastiques, ostéopénie même chez le sujet jeune voire l’enfant, fracture ostéoporotique, dégénérescence arthrosique précoce
- Pathologies de l’appareil urinaire : rétention aiguë d’urines, coliques néphrétiques (notamment liées à l’Epitomax), infections
- Douleurs neuropathiques : en l’absence de description fiable, éléments d’orientation : ATCD de lésion du SNC, de chirurgie rachidienne ou thoracique ; parfois identification d’une zone « gâchette » ou zone d’allodynie (douleur déclenchée par un stimulus normalement indolore)
- Mauvais positionnements et appuis trop marqués : corsets, assises, têtières, chaussures orthopédiques, matelas…
- Lésions cutanées, dentaires dues à un défaut d’hygiène, des frottements, des lésions de grattage (TOC), une hyposialie d’origine médicamenteuse : gingivite, intertrigo, phlyctènes…
Sans oublier :
- Les pathologies somatiques ordinaires : dysménorrhée, appendicite, caries dentaires, otite, hémorroïdes, panaris…
- Les douleurs procédurales liées aux soins dentaires, au nursing, aux actes infirmiers, aux séances de kinésithérapie (voir la fiche HandiConnect.fr F05 | Prévention de la douleur des soins chez la personne dyscommunicante)
- Les douleurs post-opératoires, immédiates et séquellaires
- Les douleurs traumatiques, conséquences d’automutilations, de violences dont la personne n’a pas conscience
- Les douleurs cancéreuses
Les prises en charge thérapeutiques, comment choisir ?
- De la douleur : type, intensité, siège
- De l’étiologie et de son incidence sur l’état de la personne (urgence)
- De la personne : âge, pathologies et déficiences, ATCD douloureux dont les effets des prises en charge antérieures
- Des traitements en cours
Les méthodes non-pharmacologiques
Les approches psychologiques :
- La communication thérapeutique : le langage verbal et non-verbal, la reformulation, l’empathie et l’écoute s’adaptent aux réactions de la personne
- La distraction : réalisée par un soignant formé, l’objet permet de défocaliser la personne de sa douleur
- La relaxation ; la détente en salle Snoezelen ou tout autre lieu-ressource ; le toucher-massage ; la balnéothérapie
- L’art thérapie ; la musicothérapie
Les moyens physiques :
- L’immobilisation de la zone douloureuse ; le changement de position
- La kinésithérapie ; la remise en mouvement ; l’Activité Physique Adaptée (APA)
- L’ergothérapie
- L’application de chaud ou de froid sur la zone douloureuse (froid pour des douleurs inflammatoires ou traumatiques ; chaud pour des contractures, des spasmes digestifs)
Particularités à prendre en compte pour le choix de la méthode
- Hyper ou hyposensibilité sensorielle : vision,ouïe, toucher, goût, odorat, vestibulaire, proprioception, thermoception
- Mode(s) de communication
- Préférences : Lieux ressourçants / anxiogènes ; Objets ou personnes rassurants
- Expériences antérieures de douleur : souvenirs du patient, du proche aidant
- Compétence cognitive et distraction : la déficience intellectuelle profonde n’est pas un obstacle à l’utilisation de cette méthode. Avec des personnes porteuses de TSA, de handicap psychique , il peut être impossible, voire dangereux de les éloigner de la réalité (l’hypnoanalgésie n’est pas recommandée).
Les antalgiques
En pratique, en fonction du mécanisme de la douleur
La douleur aiguë par excès de nociception :
Classification de l'OMS | INTENSITÉ (1) | 3 à 4 | 5 à 6 | 7 à 10 |
---|---|---|---|---|
Palier I | Antalgiques non opioïdes | Paracétamol (3) AINS (4) ⚠ Néfopam (2, 4, 6) |
||
Parlier II | Opioïdes d'action faible (5) | ⚠ Codéine (2, 4, 5, 6) ⚠ Poudre d'opium (2, 5, 6) ⚠ Tramadol (2, 5) |
||
Palier III | Opioïdes forts (5) | ⚠ Morphine (5) ⚠ Fentanyl (5) ⚠ Hydromorphone (2, 5) ⚠ Oxycodone (2, 5) ⚠ Nalbuphine (IV ou IR) |
Légende
- Intensité de la douleur : rapporter, par une règle de 3, le chiffre obtenu lors de la passation de l’échelle d’hétéro-évaluation (voir la fiche HandiConnect.fr F03 | Douleurs de la personne dyscommunicante: les repérer, les évaluer) sur une échelle entre 0 et 10
- Risque addictif connu, à surveiller
- Paracétamol : potentialise l’effet des autres antalgiques
- Contre-Indications (CI) absolues et relatives :
- AINS :
- CI absolues : varicelle
- CI relatives :
- ATCD d’ulcère, de RGO ; précaution : doubler la dose d’IPP recommandée
- Association avec un traitement thymorégulateur (Lithium, Dépakote…) car modification de l’élimination hépatique
- Codéine :
- CI absolues : enfant < 12ans, femme allaitante, après amygdalectomie
- CI relatives : dépression respiratoire, maladie neurologique évolutive
- Néfopam :
- CI : épilepsie ; risque de dysphorie. Mésusage per os entrainant un risque de dépendance
- AINS :
- Risque d’effets secondaires à prévenir :
- Pour tous les opioïdes faibles et forts : dépression respiratoire, sédation ; précaution : prescription sous surveillance, constipation ; prévention : adapter les mesures hygiéno-diététiques et le traitement laxatif
- Tramadol : épileptogène ; sédatif ; précautions : surveillance neurologique et modification de certains traitements au besoin
- CI chez l’enfant
Le M.E.O.P.A
Anxiolytique, amnésiant, anesthésiant de surface. Sur prescription médicale. Administré par un soignant formé.
CI absolues : état de conscience non stabilisé, situation vitale précaire, cavités aériques (pneumothorax, emphysème, distension abdominale, occlusion digestive, chirurgie intra-oculaire datant de moins de 3 mois), oxygénodépendance >50%. Surveiller la SpO2 et la réactivité du sujet (contact verbal, tactile).
En pratique, on retiendra :
La douleur aiguë procédurale ou douleur des soins :
Les douleurs neuropathiques et les douleurs mixtes :
Les douleurs médicalement inexpliquées et les douleurs chroniques :
Prise en charge complexe, en consultation spécialisée, multimodale (pharmacologique, physique,
psychothérapeutique).
Pour en savoir plus
Documentation
- HAS-ANESM : guide : Qualité de vie : handicap, les problèmes somatiques et les phénomènes douloureux, Avril 2017.
- Protocole National de Diagnostic et de Soins (PNDS), Générique Polyhandicap. Filière DéfiScience, mai 2020 : (32-36).
- Pédiadol : le site de référence sur la douleur de l’enfant : Guide de poche l’essentiel de la douleur de l’enfant, téléchargeable ou en version papier.
- J. Avez-Couturier, S. Joriot , S. Peudenier et coll. : La douleur chez l’enfant en situation de handicap neurologique : mise au point de la Commission « déficience intellectuelle et handicap » de la Société française de neurologie pédiatrique, Archives de Pédiatrie 25(2018) 55-62
- A. Dubois, C.Rattaz et coll. : Autisme et douleur – analyse bibliographique, Pain Res Manag 2010 Jul-Aug ; 15(4) :245-253
- D. Saravane : Les avancées de la douleur de la personne handicapée. 15ème congrès de l’ ANP3SM, juin 2017
- P. Pernes : La prise en charge de la douleur chez la personne polyhandicapée, in vivre et grandir polyhandicapé, Dunod ed.2010 :118-130
- D.Saravane : Effective management of pain in autism spectrum disorder and intellectual disability in « Overlapping Pain and Psychiatric Syndromes » chap.26, p.357-368; Oxford University Press
Antalgiques : classification, règles d'usage
- M. Galinski : Prise en charge de la douleur aiguë de l’adulte en urgences Centre National de Ressources de lutte contre la Douleur (CNRD), janv.2008.
- HAS : Fiche mémo : Prise en charge médicamenteuse de la douleur chez l’enfant : alternatives à la codéine.
- Pédiadol : le site de référence sur la douleur de l’enfant : Sédation consciente par inhalation chez l’enfant présentant des troubles du développement.
Outils
- HandiConnect.fr : fiches destinées aux soignants relatives au Handicap Psychique, aux Troubles du Développement Intellectuel, aux Troubles du Spectre de l’Autisme , au Polyhandicap.
- SantéBD : fiches, vidéos destinées aux personnes en situation de handicap et leur entourage pour mieux comprendre la douleur, les soins, …
- Centre National Ressources Douleur (CNRD).
- Société Française d’Étude et de Traitement de la Douleur (SFETD)
- Association Nationale pour la Promotion des Soins Somatiques en Santé Mentale (ANP3SM)
- Pédiadol : société savante pour le traitement de la douleur chez l’enfant.
Contributeurs
Cette fiche a été co-construite et validée par le groupe de travail HandiConnect.fr « Douleurs des personnes dyscommunicantes » dont les membres sont :
- Dr Isabelle Fontaine (IME Draveil 91)
- Dr Djéa Saravane (membre SFETD - Association Handidactique)
- Dr Elisabeth Fournier-Charrière (Centre de la douleur, Hôpital Trousseau AP-HP – Association Pédiadol)
- Dr Frédéric Maillard (CNRD)
- Laurent Mathieu (SFETD / commission infirmiers)
- Louisa Chevaleyre
- Guillemette Passeri
- Vinca Dupuis (HandiConsult 74)
- Dr Jean-Henry Ruel (HandiConsult 74)
- Dr Bruno Pollez (Association Ressources Polyhandicap Hauts-de-France ; Groupe Polyhandicap France)
- David Fernandez (Hôpital La Roche Guyon, AP-HP)
- Céline Rolland (IME, Association JB.Thiery, Maxéville 54)
- Odile Séroux (IME et MAS, Association JB.Thiery, Maxéville 54)
- Dr Marie Charlotte D’Anjou (réseau R4P)
- Dr M. Christine Rousseau (Fédération du Polyhandicap, AP-HP)
- Marc Dexet (Equipe mobile autisme APAJH 87)
- Régis Lebossé (parent expert)
- Anne Freulon (Autisme France)
- Dr Philippe Pernes (centre Antoine de Saint Exupéry, Vendin-le -Viel)
- Dr Bénédicte Gendrault (CoActis Santé)
- Dr Claire Masson (EMOSA-Equipe Mobile Somatique Autisme ; CRA Aquitaine)
- Maxime Le Moing (EMOSA-Equipe Mobile Somatique Autisme ; CRA Aquitaine)
Mentions légales
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Première publication : aout 2021
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