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N°F4
DOULEURS DE LA PERSONNE DYSCOMMUNICANTE : RECHERCHER LES CAUSES, LES SOULAGER
QUELLES SONT LES PERSONNES CONCERNÉES ?
Les personnes présentant un Handicap Psychique, un Trouble du Développement Intellectuel (TDI), un Trouble du Spectre de l’Autisme (TSA), un Polyhandicap ont des difficultés à communiquer verbalement, à exprimer leurs ressentis, leurs besoins. Soit du fait d’un défaut de mobilisation des facultés intellectuelles, soit du fait d’une déficience de celles-ci.
L’expression de leurs douleurs est atypique. L’évaluation de celles-ci requiert l’utilisation d’échelles d’hétéroévaluation. (voir fiche HandiConnect F3).
Les personnes âgées démentes, les personnes en état végétatif ou aphasiques ont des manifestations de leurs douleurs, des prises en charge particulières et ne seront pas évoquées ici.
DE QUELLES DOULEURS PARLE-T-ON ?
La douleur est « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée ou ressemblant à celle associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle » (IASP 2020).
Ressentie dans le corps, elle s’accompagne d’une souffrance psychique.
LES DIFFÉRENTS TYPES DE DOULEUR :
La douleur aiguë est un signe d’alarme.
La douleur chronique (> 3 mois) est une maladie à part entière, dont le retentissement est global (physique, psychologique, social…).
SOULAGER LA DOULEUR, QUELLES SONT
LES RÈGLES ?
« Toute personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur. Celle-ci doit être en toute circonstance prévenue, évaluée, prise en compte et traitée . » Loi du 04/03/2002 revue le 22/04/2005.
« L’incapacité de communiquer verbalement ne nie en aucune façon la possibilité qu’un individu éprouve de la douleur et qu’il a besoin d’un traitement approprié pour soulager sa douleur. » (IASP).
QUELLES SONT LES ÉTIOLOGIES ?
PRÉVALENCE PLUS ÉLEVÉE CHEZ LA PERSONNE DYSCOMMUNICANTE DE :
• Infarctus du myocarde : très fréquent chez les personnes avec handicap psychique du fait des comorbidités et de la prévalence du syndrome métabolique (voir fiche HandiConnect H21 « Handicap psychique » )
SANS OUBLIER :
• Les pathologies somatiques ordinaires : dysménorrhée, appendicite, caries dentaires, otite, hémorroïdes, panaris…
• Les douleurs procédurales liées aux soins dentaires, au nursing, aux actes infirmiers, aux séances de kinésithérapie (voir Fiche HandiConnect F5)
• Les douleurs post-opératoires, immédiates et séquellaires
• Les douleurs traumatiques, conséquences d’automutilations, de violences dont la personne n’a pas conscience
• Les douleurs cancéreuses
LES PRISES EN CHARGE THÉRAPEUTIQUES,
COMMENT CHOISIR ?
Le choix dépend :
• De la douleur : type, intensité, siège
• De l’étiologie et de son incidence sur l’état de la personne (urgence)
• Des traitements en cours
LES MÉTHODES NON-PHARMACOLOGIQUES
Les approches psychologiques : agissent sur la douleur et sur l’anxiété qui est majeure chez ces personnes.
• La communication thérapeutique : le langage verbal et non-verbal, la reformulation, l’empathie et l’écoute s’adaptent aux réactions de la personne
• La distraction : réalisée par un soignant formé, l’objet permet de défocaliser la personne de sa douleur
• La relaxation ; la détente en salle Snoezelen ou tout autre lieu-ressource ; le toucher-massage ; la balnéothérapie
• L’art thérapie ; la musicothérapie
Les moyens physiques :
• L’immobilisation de la zone douloureuse ; le changement de position
• La kinésithérapie ; la remise en mouvement ; l’APA (Activité Physique Adaptée)
• L’ergothérapie
• L’application de chaud ou de froid sur la zone douloureuse (froid pour des douleurs inflammatoires ou traumatiques ; chaud pour des contractures, des spasmes digestifs)
• Mode(s) de communication
• Préférences : Lieux ressourçants//anxiogènes Objets ou personnes rassurants
• Expériences antérieures de douleur : souvenirs du patient, du proche aidant
• Compétence cognitive et distraction : la déficience intellectuelle profonde n’est pas un obstacle à l’utilisation de cette méthode. Avec des personnes porteuses de TSA, de handicap psychique , il peut être impossible, voire dangereux de les éloigner de la réalité (l’hypnoanalgésie n’est pas recommandée).
LES ANTALGIQUES :

DE NOMBREUSES SPÉCIALITÉS ASSOCIENT 2 ANTALGIQUES (DONT DOLIPRANE
ET CODÉINE) ; RISQUE DE SURDOSAGE.
EN PRATIQUE, EN FONCTION DU MÉCANISME
DE LA DOULEUR
LA DOULEUR AIGUË PAR EXCÈS DE NOCICEPTION :
En plus du moyen non-pharmacologique choisi, prescrire un antalgique, seul ou en association, choisi d’emblée
en fonction de l’intensité de la douleur.
Pour les opioïdes, commencer par la dose minimale efficace. En fonction de la réponse du patient, modifier les doses progressivement..
LÉGENDES :
⚠️: Interactions avec les traitements psychotropes ; Avis spécialisé requis en cas de maladie respiratoire évolutive et/ou de maladie neurologique évolutive.
(1) : Intensité de la douleur : rapporter, par une règle de 3, le chiffre obtenu lors de la passation de l’échelle d’hétéro-évaluation (Cf. Fiche Handiconnect F3) sur une échelle entre 0 et 10
(2) : Risque addictif connu, à surveiller
(3) : Paracétamol : potentialise l’effet des autres antalgiques
(4) : Contre-Indications (CI) absolues et relatives :
- AINS :
CI absolue : varicelle
CI relatives :
– ATCD d’ulcère, de RGO ; précaution : doubler la dose d’IPP recommandée
– Association avec un traitement thymorégulateur (Lithium, Dépakote…) car modification de l’élimination hépatique
- Codéine :
CI absolues : enfant <12ans, femme allaitante, après amygdalectomie
CI relatives : dépression respiratoire, maladie neurologique évolutive
- Néfopam :
CI : épilepsie ; risque de dysphorie. Mésusage per os entrainant un risque de dépendance
(5) : Risque d’effets secondaires à prévenir :
• Pour tous les opioïdes faibles et forts :
dépression respiratoire, sédation ; précaution : prescription sous surveillance,
constipation ; prévention : adapter les mesures hygiéno-diététiques et le traitement laxatif
• Tramadol : épileptogène ; sédatif ; précautions : surveillance neurologique et modification de certains traitements au besoin
(6) : CI chez l’enfant
Le M.E.O.P.A : anxiolytique, amnésiant, anesthésiant de surface. Sur prescription médicale. Administré par un soignant formé. CI absolues : état de conscience non stabilisé, situation vitale précaire, cavités aériques (pneumothorax, emphysème, distension abdominale, occlusion digestive, chirurgie intra-oculaire datant de moins de 3 mois), oxygénodépendance >50%. Surveiller la SpO2 et la réactivité du sujet (contact verbal, tactile).
En pratique, on retiendra :
En cas de douleur majeure ≥ 7, prescrire de la morphine à dose efficace. L’utilisation des autres
opioïdes forts relève plutôt des services spécialisés.
LA DOULEUR AIGUË PROCÉDURALE OU DOULEUR DES SOINS :
(voir fiche HandiConnect F5)
LES DOULEURS NEUROPATHIQUES ET LES DOULEURS MIXTES :
Antiépileptiques : Gabapentine, Prégabaline, Lamotrigine.
Antidépresseurs tricycliques : Amitryptiline, Clomipramine. Autres antidépresseurs.
Traitements locaux : Lidocaïne topique.
LES DOULEURS MÉDICALEMENT INEXPLIQUÉES ET LES DOULEURS CHRONIQUES :
Prise en charge complexe, en consultation spécialisée, multimodale (pharmacologique, physique,
psychothérapeutique).

POUR EN SAVOIR PLUS
• Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : Consulter
• HAS-ANESM : guide : « Qualité de vie : handicap, les problèmes somatiques et les phénomènes douloureux » Avril 2017 . Consulter
• PNDS : Protocole National de Diagnostic et de Soins, Générique Polyhandicap. Filière DéfiScience- mai 2020 : (32-36). Consulter
• Pédiadol : le site de référence sur la douleur de l’enfant : Guide de poche « l’essentiel de la douleur de l’enfant », téléchargeable ou en version papier. Consulter
• J. Avez-Couturier, S. Joriot , S. Peudenier et coll. : « La douleur chez l’enfant en situation de handicap neurologique : mise au point de la Commission « déficience intellectuelle et handicap » de la Société française de neurologie pédiatrique », Archives de Pédiatrie 25(2018) 55-62 : Consulter
• A. Dubois, C.Rattaz et coll. : « Autisme et douleur- analyse bibliographique », Pain Res Manag 2010 Jul-Aug ; 15(4) :245-253 : Consulter
• D. Saravane : « Les avancées de la douleur de la personne handicapée ». 15ème congrès de l’ anp3sm, juin 2017 : Consulter
• P. Pernes : La prise en charge de la douleur chez la personne polyhandicapée, in vivre et grandir polyhandicapé, Dunod ed.2010 :118-130 : Consulter
• D.Saravane : «Effective management of pain in autism spectrum disorder and intellectual disability» in «Overlapping Pain and Psychiatric Syndromes» chap.26, p.357-368; Oxford University Press Consulter
ANTALGIQUES : CLASSIFICATION, RÈGLES D’USAGE :
• M. Galinski : « Prise en charge de la douleur aiguë de l’adulte en urgences » Centre National de Ressources de lutte contre la Douleur (CNRD), janv.2008. Consulter
• HAS : Fiche mémo : « Prise en charge médicamenteuse de la douleur chez l’enfant : alternatives à la codéine ». Consulter
• Pédiadol : le site de référence sur la douleur de l’enfant : «Sédation consciente par inhalation chez l’enfant présentant des troubles du développement». Consulter
LIENS UTILES :
• Handiconnect.fr : fiches destinées aux soignants relatives au Handicap Psychique, aux Troubles du Développement Intellectuel, aux Troubles du Spectre de l’Autisme , au Polyhandicap. Consulter
• SantéBD.org : fiches, vidéos destinées aux personnes en situation de handicap et leur
entourage pour mieux comprendre la douleur, les soins , … Consulter
• CNRD : Centre National Ressources Douleur. Consulter
• SFETD : Société Française d’Étude et de Traitement de la Douleur. Consulter
• anp3sm : Association Nationale pour la Promotion des Soins Somatiques en Santé Mentale
Consulter
• Pédiadol : société savante pour le traitement de la douleur chez l’enfant. Consulter
Contributeurs
Cette fiche a été construite et validée par le groupe de travail HandiConnect « douleurs des personnes dyscommunicantes » dont les membres sont : Dr Isabelle Fontaine (IME Draveil 91), Dr Djéa Saravane (membre SFETD-Association Handidactique), Dr Elisabeth Fournier-Charrière (Centre de la douleur, Hôpital Trousseau AP-HP – Association Pédiadol), Dr Frédéric Maillard (CNRD), Laurent Mathieu (SFETD / commission infirmiers), Louisa Chevaleyre, Guillemette Passeri, Vinca Dupuis (HandiConsult 74), Dr Jean-Henry Ruel (HandiConsult 74), Dr Bruno Pollez (Association Ressources Polyhandicap Hauts-de-France ; Groupe Polyhandicap France), David Fernandez (Hôpital La Roche Guyon, AP-HP), Céline Rolland (IME, Association JB.Thiery, Maxéville 54), Odile Séroux (IME et MAS, Association JB.Thiery, Maxéville 54), Dr Marie Charlotte D’Anjou (réseau R4P), Dr M. Christine Rousseau (Fédération du Polyhandicap, AP-HP), Marc Dexet (Equipe mobile autisme APAJH 87), Régis Lebossé (parent expert), Anne Freulon (Autisme France), Dr Philippe Pernes (centre Antoine de Saint Exupéry, Vendin-le -Viel), Dr Bénédicte Gendrault (CoActis Santé), Dr Claire Masson (EMOSA-Equipe Mobile Somatique Autisme ; CRA Aquitaine), Maxime Le Moing (EMOSA-Equipe Mobile Somatique Autisme ; CRA Aquitaine).
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Sa réalisation et sa mise en ligne en accès libre ont été rendues possibles grâce aux soutiensde l‘Assurance Maladie, de la CNSA et des Agences Régionales de Santé.
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