Les troubles de la déglutition engendrent des fausses routes à l’origine de maladies respiratoires, principale cause de morbi-mortalité des personnes polyhandicapées.
La prévention des fausses routes s’appuie sur un bilan des capacités d’alimentation 1 et une observation pendant les repas (voir fiche HandiConnect.fr F12b | Bilan des capacités d’alimentation : exemple)
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Différents types de fausses routes
L'alimentation de la personne polyhandicapée. ROFIDAL T. Editions Erès, 2022, pages 67-74
Schéma du carrefour aéro-digestif, permettant de distinguer :
La fausse route nasale par protection inefficace du voile du palais : le contenu de la bouche remonte dans les fosses nasales.
La fausse route trachéale par difficulté d’ascension du larynx : le contenu de la bouche passe dans la trachée et non dans l’œsophage.
Suspecter un trouble de la déglutition devant
Toux pendant ou après le repas (fausse route trachéale directe, redoutable)
Stase salivaire
Hauts le cœur et refus alimentaires
Fatigabilité allongeant le temps de repas
Infections respiratoires à répétition
Certaines fausses routes sont silencieuses !
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Prévention des fausses routes
Elle repose principalement sur l’installation de la personne et de l’aidant ainsi que sur la modification de la texture des aliments.
L’installation pour le repas et le choix de la texture des aliments varient selon l’état de la personne et son développement
Installation de la personne pour les repas
La personne peut-elle adapter sa posture contre la pesanteur à chaque repas et pendant le temps du repas ?
Si oui : adaptation du siège aux capacités posturales et à la morphologie de la personne
Accoudoirs, repose-pieds
Adaptation de l’assise et du dossier, ou siège moulé
Si non :
Inclinaison du siège en arrière (bascule d’assise ou kit cool®) (ou coussin)
Accoudoirs, têtière/surtêtière pour garantir la flexion du cou
Dans tous les cas, cou en flexion !
Axe de la tête toujours incliné vers l’avant par rapport à l’axe du dos, quelle que soit la position de celui-ci dans l’espace
L'alimentation de la personne polyhandicapée. ROFIDAL T. Editions Erès, 2022, pages 67-74
Schéma représentant la position correcte du cou en flexion dans 3 situations cliniques différentes :
- A gauche, le patient a besoin d’être incliné vers l’arrière.
- Au milieu il est assis dos vertical.
- A droite il est assis avec une antéflexion du tronc.
Position de l'aidant
Schéma représentant la hauteur de l’aidant face au patient :
A gauche, position incorrecte : les yeux de l’aidant sont plus haut que ceux du patient, celui-ci défléchit donc le cou pour faire monter son regard vers l’aidant
A droite, position correcte : les yeux de l’aidant sont à la même hauteur que ceux du patient, celui-ci garde le cou en flexion quand il regarde l’aidant
Aidant assis sur un tabouret sur roulettes à hauteur réglable
Schéma représentant l’action des deux mains de l’aidant :
A gauche, action incorrecte : une main de l’aidant présente la cuillère au patient, l’autre ne fait rien
A droite : une main de l’aidant présente la cuillère au patient, l’autre est positionnée au niveau de l’occiput du patient et s’assure que le cou reste en flexion
Aidant droitier : assis à droite de la personne, s’assure éventuellement avec sa main gauche que le cou ne se place pas en extension
La main qui ne tient pas la cuillère ne doit jamais être placée sur le front ni le menton de la personne qui mange.
Introduction de la cuillère
Schéma représentant le mouvement de la cuillère et la position du cou :
A gauche situation incorrecte : la cuillère est introduite de haut en bas dans la bouche du patient et le cou ne reste pas fléchi
A droite situation correcte : la cuillère est présentée par le bas et le cou reste fléchi
Proposer la cuillère en-dessous du plan de la bouche
Favoriser la flexion du cou pour la prise des aliments
Extraction de la cuillère
Schéma représentant le mouvement de la cuillère et la position du cou
A gauche situation incorrecte : la cuillère est extraite vers le haut et le cou du patient ne reste pas fléchi
A droite situation correcte : la cuillère est extraite horizontalement et le cou reste fléchi
Extraire la cuillère le plus horizontalement possible pour ne pas provoquer une extension du cou
Adaptation de la texture des aliments
Les 3 conditions indispensables pour la mastication
Motricité latérale de la langue efficiente
Molaires en opposition
Muscles masticateurs vigoureux
Si les 3 conditions sont remplies alors cela rend la texture en morceaux possible→ texture en morceaux possible
Morceaux tendres (viande, légumes, fruits) ou plus durs mais fondants (biscuits)
Exclure les feuilles (salades, pâte feuilletée)
Exclure les fromages fondus collant
Si motricité latérale de langue absente alors cela rend la texture mixée obligatoire→ texture mixée obligatoire (diagramme IDDSI niveau 4)
Aliments tous finement mixés ce qui donne une→ texture lisse
Chaque composant est disposé séparément dans l’assiette
Déglutition sans mastication
Si motricité de langue présente mais molaires non en opposition et/ou muscles masticateurs faibles alors cela rend la texture moulinée possible→ texture moulinée possible (diagramme IDDSI niveau 5)
Aliments écrasés dans l’assiette ou moulinés au mixer ce qui donne une→ texture granuleuse
Sauce pour lubrification indispensable
Déglutition après 4 ou 5 mouvements de mastication
Adaptation de la texture des boissons
Boissons épaissies
Poudre d’amidon +/- gomme de xanthane
Pour boissons chaudes ou froides
Ou
Boissons gélifiées
Gélatine ou agar-agar
Pour boissons froides
Tenir compte des apports caloriques induits !
Boire au verre ? Uniquement si la personne est capable d’aspirer (ne jamais verser le liquide dans la bouche)
Les clefs pour un repas serein
Limiter les flux sensoriels autres que la pesanteur (bruits, lumière, mouvement, douleur)
Prévoir le temps et le rythme nécessaires au confort et à la sécurité de la personne
Viser la convivialité pour la personne et non pour l’aidant
Savoir renouveler la réflexion sur les conditions du repas
Pour en savoir plus
Références
↑ ROFIDAL T. Bilan simplifié des capacités d’alimentation. Motricité Cérébrale, volume 4, numéro 21, 2023, pages 21-24
Documentations
ROFIDAL T. L’alimentation de la personne polyhandicapée. Editions Erès, 2022, pages 67-74
JOUVE A., TOULLET P. L’appareillage dans la paralysie cérébrale et le polyhandicap. Editions Sauramps Médical, 2024, pages 145-149
BENIGNI I. L’alimentation au quotidien des personnes polyhandicapées, les repas dans les établissements de santé et médico-sociaux: les textures modifiées, mode d’emploi. Agence Nationale d’Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), 2011